Si vous avez lu la petite ébauche de Call Of Nemesis: L'appel de Nemesis, peut être savez-vous qu'il s'agit d'une tétralogie....
Sauf que désormais, la série compte des nouvelles!!!!
Directement liées aux évènements de l'histoire principale, elles permettent de se faire une opinion bien plus précise sur ce que sera le livre (et l'histoire).
Je les écris de façon à ce qu'elles soient lues indépendamemnt, donc ne vous inquiétez pas, vous comprendrez =).
Prochaine nouvelle prévue pour le Lundi 13 août....
La plume rouge
De Thomas Carnicer ©Copyright 2007
Chapitre 1 : La tempête Il pleuvait. D’un autre côté, c’était tout à fait normal. La météo avait prévu hier soir une pluie torrentielle sur l’Est de l’Espagne. Le village n’était donc pas épargné.
Une à une, un à un, les tables étaient nettoyées, et les verres, essuyés.
Bientôt le bar allait fermer ses portes pour la journée. Un soupir de soulagement vint naturellement. Les longues heures de boulot accumulées dans la journée se faisaient maintenant sentir sur le physique et sur le moral. Le travail en soi n’était pas forcément dur, mais assumer la fermeture était épuisant, surtout lorsqu’on était seul.
_Il ne reste plus que les torchons à ranger, et je ferme !
A quoi bon parler seul ? Peut-être pour se rassurer.
Bien que cet endroit fusse accueillant en pleine journée, ce n’était pas forcément le cas à cette heure, d’autant lorsque le déluge attendait patiemment de tremper jusqu’aux os sa dernière victime.
Quelques éclairs illuminèrent la pièce. Le tonnerre, un sursaut, le torchon glissa des mains et atterrit sur le sol.
_Maudit orage !
Des yeux désormais expérimentés vérifièrent rapidement l’ensemble de la pièce.
_Bon ! Et bien j’ai fini !
Enfin.
Le bruit d’une respiration encore haletante fut couvert par la porte qui claqua.
Dehors, le vent contraignait à se cramponner au mur. Il était vraiment temps de rentrer.
Maintenant, voilà que c’était la grille qui faisait des siennes !
_Tu vas t’abaisser, fichue grille ! Je veux rentrer chez moi !
Dans un fracas monstrueux, la grille s’exécuta. Très rapidement, la clé, la serrure, le verrouillage.
_Enfin chez soi !
Cela faisait un sacré moment que je n’avais pas été aussi contente de terminer une journée. J’avais vraiment les os glacés. Je me dépêchai de poser mon sac à main, d’enlever mon manteau trempé, encore ruisselant, et d’ôter mes chaussures que je mis sur les talons contre le mur.
Je courus ensuite vers la salle de bain chercher une serviette.
Je détestais que mes cheveux soient mouillés. Sans doute parce qu’ils mettaient toujours des heures avant de sécher complètement.
_Oh, et puis zut !
J’envoyai valdinguer dans la petite salle de bain mes vêtements. Un peignoir, des pantoufles, et j’étais la plus heureuse des femmes, pensai-je en rigolant.
J’étais surtout bien plus au chaud.
De mes pieds traînards, je parvins jusqu’au frigo où une bouteille de lait m’attendait. Dans le placard de droite, du chocolat en poudre. Le meilleur.
Quelques minutes et une sonnerie de micro-onde plus tard, j’avais un chocolat chaud délicieux dans les mains.
Exactement ce qu’il me fallait, avec une série télé.
Vu comme cette soirée s’organisait, j’étais partie pour me faire un bon petit plateau télé. Déjà que la flemme de cuisiner pour moi toute seule était forte, elle triompha particulièrement ce soir.
Et c’est ainsi que se passa la soirée : le plateau repas, la télé et moi.
_La vaisselle ? lançai-je avec un air de dégoût. Je la ferais demain !
Un air pur me fit doucement ouvrir les yeux. Je sentis un contact délicat sur ma peau.
Une plume blanche. Elle virevolta quelques temps au gré du vent, puis se posa délicatement, rejoignant les millions, voire les milliards de plumes qui jonchaient le sol de cette plaine.
Je levai la tête. Toutes ces plumes...
Elles volaient, chacune dans une direction, sans pour autant jamais s’entrechoquer. L’une d’elle, toute rouge, se dirigea vers moi.
Je tendis la main. Elle s’y posa. C’était une magnifique plume, dont la couleur éclatante contrastait avec le blanc du paysage.
Mais une étrange sensation me dérangea rapidement. Je tendis la main vers moi.
Une goutte coula de la plume jusqu’à mon poignet. Je mis quelques secondes avant de m’apercevoir qu’il s’agissait de sang.
Surprise, je soufflai immédiatement sur la plume maculée, qui découvrit en s’envolant une tâche de sang sur ma main.
Je la fixais, sans comprendre, lorsque au loin, derrière elle, je vis Xavier à genoux, blessé.
J’accourus, criant son nom, terrifiée qu’il lui soit arrivé quelque chose.
Mais ce n’était pas lui. Bien sûr, cet homme devant moi lui ressemblait. Mais ce n’était pas lui, j’en étais certaine.
_Qui êtes-vous ?
Il me regarda, l’air anéanti, fatigué par sa blessure.
_La… La vraie question… N’est pas de savoir qui… Je suis. dit-il. La vraie question est de savoir qui tu… es toi.
_Qui je… répétai-je, immobile.
Il me regarda quelques secondes. Les gouttes de sang qui s’échappèrent de son abdomen allèrent s’écraser sur le sol, contaminant les plumes de la couleur écarlate.
J’étais incapable de dire quoi que ce soit. Comme pour me tirer de mon mutisme, il répondit, la voix toujours saccadée.
_...L’avenir.
Puis il appuya sur son abdomen. Un cri. Il se tordit de douleur.
Soudainement, toutes les plumes s’envolèrent devant mes yeux.
Ce qui normalement était la douceur matinale de mon lit fut une véritable torture. Prise de nausées, il fallut que je retienne mon envie de vomir.
Quel était donc ce rêve ?
Dans la salle de bain, je regardai le lavabo. Si je devais vomir, ce devait être ici. Peut être avais-je attrapé quelque chose avec la pluie de la veille. Je regardai mon reflet dans la glace. Mon mal avait pu être conséquent du rêve. Mais comment un simple rêve pouvait-il avoir autant d’influence sur moi ?
Cette question me troubla durant tout le temps que dura ma préparation qui, heureusement pour moi, fut machinale.
Pas le temps ni l’envie de me coiffer. Je me fis une queue de cheval, et pris sur moi pour être prête à l’heure.
Bien que je ne fusse pas dans mon meilleur état, je saluai d’un geste de tête la grue du village en fermant la porte de ma maison.
Elle avait changé de place depuis hier matin. Sans doute un nouveau lotissement à construire.
Je marchai lentement, encore étourdie de mon réveil. Fichu rêve. Il allait me gâcher la journée.
Je fis donc quelques mètres, en évitant de trop regarder le ciel et son soleil éblouissant.
Un bruit de clôture se fit entendre. Ce devait être Xavier qui sortait de chez lui.
Au bout de la rue, je le vis effectivement m’attendre. Mais je n’avais décidemment pas envie de presser le pas.
_Alessandra ? Tu viens ? On va être en retard ! lança-t-il.
Il se rapprocha de moi.
_Ca ne va pas ? Tu n’as pas l’air en pleine forme. dit-il en arrivant à ma hauteur.
_Si, si, ça va. J’ai seulement la migraine... dis-je en portant la main à ma tempe.
_T’aurais pas encore fait la fête ? dit-il, d’un air amusé.
_Non... J’ai assez mal dormi. En plus, j’ai fait un rêve horrible…
_Ah ? Raconte ?
Je portai mon regard sur lui. Même s’il était depuis un bout de temps mon ami, je n’allais pas lui parler du rêve. Rêver de son ex n’était déjà pas vraiment plaisant, mais alors en discuter avec lui, ça, jamais !
De toute manière, il nous fallut que quelques minutes pour rejoindre le bar.
Le village n’étant pas bien grand, il fallait environ un quart d’heure pour le traverser. Cela allait changer avec ces nouveaux lotissements.
Mon uniforme m’attendait là où je l’avais laissé la veille.
_Bonjour, les jeunes ! Alors, on est en retard !? apostropha Inès derrière moi.
_Non, non… Nous sommes à l’heure !
Elle sourit.
_Voyons tu sais bien que je vous taquine ! Je ne vais pas pinailler pour une petite minute en plus ou en moins !
Puis elle s’en retourna dans l’arrière boutique.
Sans pinailler, elle m’avait tout de même fait remarquer que j’étais en retard, et qu’elle l’avait noté.
_Fais pas attention. Elle l’a pas dit méchamment, dit Xavier.
J’acquiesçai, de fainéantise de parler. De toute façon, cela faisait partie de son caractère.
L’ouverture se fit avec les habitués. Des retraités pour la plupart, qui passaient leur temps à jouer sur la terrasse, même en ce mois d’Octobre.
_Bonjour, ma petite Alessa, dit Luis. Comment ça va ce matin ? Tu as vu, ils construisent encore d’autres maisons avec cette fichue grue...
Je me contentai de répondre poliment.
_Et comment vous allez, tous les deux ? me lança-t-il d’un air complice.
_Je ne suis plus avec Xavier depuis un mois et demi, Luis, répondis-je, lentement.
_Ah... Excuses-moi, je ne m’en souvenais plus, dit-il, désolé. Tu sais, à mon âge...
Ca pour le savoir, je le savais. Cela me faisait quelque part de la peine qu’il ne se souvienne jamais d’une fois sur l’autre les questions –et surtout les réponses- de la veille.
Je vis qu’il cherchait autre chose à me dire, afin de ne pas terminer sur une maladresse. C’était touchant de gentillesse.
_Et pour cette fin de semaine ? Tu as prévu quoi, dis moi ?
J’éclatai de rire. Il n’allait pas aimer la réponse.
J’avais prévu de sortir avec mes copines le samedi, à Barcelone.
La journée, en ville, pour voir mes parents et la nuit, en boîte, jusqu’à plus d’heure.
Le dimanche serait pour récupérer.
_Oh ! Ce n’est plus de mon âge ça ! dit-il en se levant pour partir avec un geste de la main. Bon ! Je te laisse ! Portes-toi bien !
Me porter bien... Il n’avait pas idée du mal que je me donnais pour paraître réactive et éveillée.
Même si, routine oblige, la journée passa dans l’ensemble assez rapidement, ce fut dur.
Des coups de barre, des maux de têtes, mais c’était surtout le fait d’avoir toujours à l’esprit la plume rouge dans ma main. Ce rêve avait quelque chose de familier, sans que je puisse savoir quoi. Cela me contrariait, comme lorsque l’on a une réponse sur le bout de la langue, sans pour autant pouvoir la prononcer.
La seule attraction de la journée fut l’arrivée de deux jeunes français qui, dans un espagnol sommaire, me demandèrent deux baguettes de pain et deux glaces trois chocolats.
Habituellement, les étrangers venaient durant l’été et non en ce début d’Hiver. Les français étaient particulièrement nombreux dans cette région, ce qui n’était pas pour plaire à tout le monde. Pour ma part, je me régalais toujours, presque avec sadisme, de voir le mal avec lequel ils essayaient de s’exprimer.
Ma migraine passa dès le vendredi soir, ce qui me permit de me préparer physiquement et mentalement pour la journée du samedi. Je fus heureuse de ne plus faire de rêve aussi perturbant.
Le week end se passa exactement comme je l’avais expliqué à Luis.
De retour le dimanche après midi, j’avais élu domicile le fauteuil du salon. Devant la télé, la loque à moitié endormie que j’étais regardait les films. A moitié toujours.
_J’ai rien compris à ce film. C’était vraiment mauvais, marmonnai-je.
J’éteignis la télé, les yeux quasi-closs. Quitte à dormir, autant retrouver mon lit.
Un long soupir de satisfaction plus tard, j’étais vautrée sous les couvertures, prête à être accueillie par Morphée.